Un demi-siècle de lutte contre l’injustice

Créée il y a plus de cinquante ans en France par l’abbé Pierre, alors député national, la compagnie des chiffonniers d’Emmaüs possède une active communauté en Argentine, installée à Burzaco, qui applique les préceptes fondateurs du mouvement et lutte contre toutes les formes d’injustice, en particulier sociales…

Histoire de chiffons. Comme dans le reste du monde, l’activité principale de la communauté est la récupération, le tri et la vente de bric à brac, linge etc., ce que l´on appelle ici la « trapería ». Il y a cependant peu de clients capables de payer 1 peso pour acheter une robe, un pantalon, un chemisier car, dans le quartier, le chômage avoisine les 70 % de la population… Par ailleurs, en ces temps de crise, les gens se débarrassent moins de leurs ustensiles usagés et il est donc plus difficile d´obtenir les objets qui seront restaurés afin d´être vendus. Pour cela Emmaüs Burzaco compte des ateliers de réparation d’ordinateurs, d’électroménager, de menuiserie et de couture. Un hangar abrite les machines pour compacter le papier, le carton, et assembler des ballots de tissus.

La communauté. Créée il y a 46 ans, la communauté de Burzaco compte aujourd’hui 22 compagnons qui travaillent –contre rémunération– dans les ateliers avec des habitants du quartier. Seize d’entre eux sont logés sur place. Les compagnons, âgés 30 à 50 ans, sont les uns de passage, les autres installés pour longtemps. Pour tous, on applique les règles de vie des communautés Emmaüs : accueillir sans questionner sur le passé ; tout partager : la vie quotidienne et le travail qui est la seule source de revenu ; collaborer aux initiatives locales (il est toujours possible de venir en aide à des plus démunis que soi) ; lutter contre l’injustice. Le responsable, Fernando, diplôme de maître des écoles en poche, a choisi le travail social après avoir fait des études de droit. Installé avec sa famille au village, il est aujourd’hui le secrétaire d’Emmaüs Amérique latine.

L’action d’Emmaüs. Le travail de la « trapería » permet aujourd’hui à la communauté de vivre mais pas de dégager des excédents. Or il lui faut subvenir aux besoins des deux œuvres qu’elle a mises en place : la Casa del Niño et l’Ecole Technique. Heureusement Burzaco est jumelée avec trois communautés françaises qui envoient deux containers de vêtements par an qui sont vendus au profit des œuvres.

La Casa del Niño accueille 300 enfants tous les jours de semaine, organise le soutien scolaire, donne trois repas par jour et fournit une aide psychologique aux enfants et aux familles L’Ecole Technique est spécialisée dans les métiers du bâtiment et assure une formation initiale diplômante et des cours du soir pour adultes.

Dans ces deux instances, seuls les enseignants sont payés par le gouvernement. Le reste est pris en charge par Emmaüs Burzaco qui compte ainsi un total de 100 salariés en plus de l’équipe de bénévoles. Pour les projets plus ambitieux, c’est la solidarité internationale du mouvement qui est sollicitée. Ainsi, la Fondation Abbé Pierre pour le logement a donné les sommes nécessaires pour la construction de logements à Burzaco.

Pour réagir face à la crise, l’idée a surgi d’utiliser les terrains vagues des alentours pour y créer un potager. Sous la houlette d’Alfredo, neuf compagnons se sont mis au travail et suivent un cours hebdomadaire à l’INTA (Institut national des techniques agricoles). Cependant, peu de gens du quartier ont pour l’instant accepté de collaborer. Par ailleurs, la communauté a récemment décidé de construire un « comedor » pour adultes.&lt Autour de la communauté, l’association des Amis d’Emmaüs regroupe des bénévoles qui apportent leurs compétences -architectes, avocats, etc.- et permettent par leurs connaissances de faire aboutir les projets. Parmi eux, deux footballeurs professionnels se rendent régulièrement à la Casa del Niño pour enseigner le foot.

Emmaüs en Argentine et dans le monde. Emmaüs, qui existe depuis plus de 50 ans, est né en 1949 de la rencontre entre l’Abbé Pierre, alors député, et celui qui sera le premier « compagnon », Georges. Cette rencontre portait en elle toutes les valeurs futures d’Emmaüs. En Argentine, Burzaco est la seule véritable communauté. Dans les huit autres lieux d’action d’Emmaüs dans le pays, l’activité réalisée est la même mais ne comprend pas le volet vie commune. Ce sont des associations d’Amis d’Emmaüs, lesquelles sont fédérées au niveau national puis par continent.

 

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