Claude Monet (1840-1926) : un hommage lumineux

DES DEBUTS DU PEINTRE DANS LES ANNEES 1860 AUX ULTIMES TABLEAUX DE LA SERIE DES NYMPHEAS A GIVERNY, LES GALERIES NATIONALES DU GRAND PALAIS PROPOSENT UNE RETROSPECTIVE INEDITE DE L’ŒUVRE DU PROLIFIQUE IMPRESSIONNISTE CLAUDE MONET. LA SCENOGRAPHIE D’HUBERT LE GALL MET SUPERBEMENT EN VALEUR LES 176 TOILES PRESENTEES AU PUBLIC.

On découvre, ou redécouvre avec bonheur l’artiste, chef de file des impressionnistes. Le musée Marmottan n’a pas pu se séparer de l’astre de son Musée : Impression soleil levant…Qu’importe ! L’expo se fera sans lui tout comme l’expo Munch, volontairement privée de son cri, aura permis au public de la Pinacothèque de se concentrer sur d’autres œuvres majeures. Des aspects moins connus de l’œuvre de Monet, notamment des séries et des ensembles réunis pour l’exposition, des tableaux provenant de musées du monde entier, nous aident à mieux comprendre pourquoi et comment, au début du XXe siècle, les recherches et les orientations de l’artiste constitueront un des fondements de l’art moderne…

Dès les premières salles, on est littéralement emporté par cette valse impressionniste On comprend vite : c’est bien elle qui mène le bal. La lumière : des marines en Normandie, aux fameuses grenouillères en passant par la Seine à Bougival, les environs d’Argenteuil, l’étourdissant Paris, sa gare Saint Lazare, les rives méditerranéennes, ou encore Londres, Venise, ou Giverny, sans oublier les scènes d’intérieur. Mais comment Monet réussit-il à décliner autant de lumières magiques ? Bien sûr, d’autres peintres ont mis à profit cette belle découverte que la couleur est lumière, et que, de ce fait, l’effet chromatique est modifié selon les intensités lumineuses. Mais rares sont ceux, qui, comme Monet, parviennent à la rendre aussi irréelle, poétique, parfois fugace ou encore ardente. Comment Monet arrivait-il à peindre avec autant de brio l’instantanéité de ses impressions ? Sans doute donnait-il une partie de la réponse à son ami, le peintre Bazille : “C’est à force d’observations, de réflexion, que l’on trouve.” (1864)

Focus sur quelques tableaux

“La gare Saint-Lazare à l’extérieur”. L’ensemble des gares est impressionnant. Monet connaissait très bien la gare Saint-Lazare, habitant tout près, il prenait le train pour se rendre à Argenteuil ou encore en Normandie… “C’est un de ces lieux privilégiés qu’il fréquente beaucoup, et c’est tout naturellement qu’en 1877 il demande l’autorisation de s’y installer pour peindre”, commente Anne Roquebert, l’une des Commissaires de l’exposition et Conservateur en chef au musée d’Orsay. Il effectuera plusieurs tableaux. “On ne parlera pas encore de “séries”, (comme dans les meules, les peupliers, la cathédrale de Rouen où il abordait le même motif sous des éclairages différents). “Dans la gare, il se déplace à sa guise et change de point de vue”. Il est probable que l’idée des séries germera à Saint-Lazare. On est fasciné par cette lumière filtrée à travers de grandes verrières, architectures métalliques, fort belles, mais qu’on imagine contraignantes pour l’artiste dans l’exécution. La lumière changeante, ces effets colorés sont nouveaux pour lui. “Cette “bête humaine”, ces machines à vapeur projettent des panaches de fumées, véritable éblouissement de couleurs pour le peintre”. Pour l’anecdote, Monet parviendra à déplacer les horaires de trains, régentant ainsi la vie de la gare pendant quelques jours ! “Faire partir le train de Mantes deux heures plus tard pour répondre à la requête d’un artiste, voilà qui serait impensable de nos jours ! Cet ensemble de tableaux lui était cher : il présentera à la troisième exposition impressionniste de 1877 pas moins de 8 gares Saint Lazare !”, poursuit Anne Roquebert. Les critiques sont enthousiastes à l’époque et Zola, inspiré, parlera de “poésie moderne”…L’évocation de la modernité est justement un sujet qui l’intéresse et qui le rapproche de l’écrivain.

“Les Nymphéas”, 1904, Musée des beaux-arts, Le Havre. L’œuvre de Monet s’oriente vers un aspect décoratif. À Giverny, le bassin des nénuphars devient alors son sujet de prédilection. Vers la fin de sa vie, les objets disparaîtront presque totalement de ses toiles pour ne laisser la place qu’à la lumière, la forme et la couleur. Il annonce ainsi l’art moderne du XXème siècle et l’art abstrait.

“Giverny” ! “Il commence par s’installer en louant la maison en 1883”, commente Anne Roquebert, “il s’y sent bien et décide de l’acheter en 90. Les séries, en maturation dans les répétitions deviennent possibles…il peut prendre le temps. Il ira même jusqu’à détourner l’Epte pour faire un grand bassin, le bassin aux Nymphéas qu’il couronne d’un pont japonais”…(l’influence de l’Art Japonais est considérable chez Monet). “Ce sujet essentiel de la fin de sa vie l’amènera jusqu’aux Nymphéas de l’Orangerie dont il fera cadeau à l’Etat pour fêter la victoire en 1917. Malheureusement, l’ensemble ne sera installé qu’un an après sa mort, en 27”.

D’autres tableaux fascinants : Fragment du “Déjeuner sur l’herbe”(1865), Musée d’Orsay,
“La Grenouillère”(1869), The Metropolitan Museum of Art, New York, “Le Port du Havre, effet de nuit” (1873), collection particulière, “Terrasse à Sainte-Adresse” (1867),
The Metropolitan Museum of Art, New York

Monet : une expérience sensorielle à ne pas manquer !

Pétra Wauters

Grand Palais, 3, avenue du Général Eisenhower, (75008) Paris. Réservation www.monet2010.com

22 septembre au 24 janvier 2011

 

Partager sur