Madame l’Ambassadrice de France quitte bientôt l’Argentine

Claudia Scherer-Effosse, ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire en Argentine, arrive bientôt au terme de sa mission dans le pays. Avant son retour à Paris en août, elle a aimablement reçu le Trait d’Union et évoqué ses quatre années passées à la tête de la mission diplomatique française.

C’est dans son bureau du second étage de l’hôtel Ortiz Basualdo qu’elle reçoit le Trait-d’Union, en commentant que cette pièce, ou nous nous trouvons « …était une …chambre, (probablement la chambre à coucher principale du petit hôtel !) de forme arrondie… même les portes sont légèrement incurvées ! ». Le bureau grand mais accueillant, est paraît-il souvent comparé au bureau ovale de la Maison blanche de Washington, dont il aurait la forme et la taille. Faisant partie du décor, se trouvent, comme il se doit, le portrait du président Macron, un buste de Marianne et les drapeaux français, argentin, européen et LGBTQI+.

Claudia Scherer-Effosse passe en revue ses quatre années passées à la tête de la mission diplomatique depuis son arrivée à Buenos Aires en août 2019, juste au moment des « PASO » argentines. C’était son second séjour dans le pays, elle avait déjà occupé à l’ambassade de France, le poste de première conseillère dans les années 2008-2012. Et le premier sujet qu’elle évoque est bien sur « la pandémie », moins de six mois après son arrivée le pays était, par ordre du gouvernement, cloître. Le fonctionnement de l’ambassade a dû se réinventer, « Oui, nous avons dû nous adapter, faire des réunions zoom comme tout le monde. Mais nous, les diplomates, faisions partie des seuls qui avaient le droit de se déplacer, donc nous avons tous continue à venir ici, sans se regrouper pour autant ». Le travail diplomatique fait de relations bilatérales, de coopération et d’échanges avec les représentants du pays d’accueil, s’en est ressenti, bien moins intense, les échanges se sont forcément amoindris, à un moment toutefois critique pour l’Argentine en pleine négociation de restructuration de sa dette extérieure, entre autres avec le Club de Paris. L’arrêt de toute mobilité a eu des conséquences néfastes dans bien des domaines :  il n’y a eu, par exemple, aucune visite officielle, sauf une quelques mois plus tard avec l’arrivée d’un groupe de sénateurs français qui s’est rendu directement pour une durée de plusieurs jours à Mendoza. La crise sanitaire suivie des élections en France ont coupé toutes initiatives importantes. Autre impact de la pandémie pour l’ambassadrice a été l’impossibilité d’exécuter son objectif initial : sillonner le pays pour aller au-devant des représentants officiels des provinces. Des entretiens avec les gouverneurs se sont organisés mais en visioconférences, lesquels ont, malgré tout, été enrichissants à de nombreux titres, estime-t-elle. Quant aux visites sur place, elle a pu mettre son projet à exécution dès les restrictions levées et a visité et pris, dans le cadre de ses fonctions, de nombreux contacts, un peu partout dans le pays.

Diplomatie économique 

Dans le cadre d’un accompagnement rigoureux, elle a été aux côtés des entreprises, plongées dans un contexte économique compliqué, aux prises à des mesures officielles astreignantes, afin de les aider à surmonter grand nombre d’obstacles, comme, pour ne citer qu’un exemple l’appui spécifique à leurs demandes de permis d’importation. Elle salue les importants investissements effectués, ces dernières années par les entreprises françaises : dans le secteur des énergies renouvelables, l’usine photovoltaïque de Neo En à Salta, la centrale éolienne deTotal Éner à Santa Cruz ; dans le secteur automobile, la création d’une chaîne ultra moderne de fabrication de Peugeot 208 de Stellantis ; dans le secteur des énergies traditionnelles le nouveau champ d’extraction de gaz off-shore Fenix de Total Energies : les puits d’extraction de gaz de schiste à Vaca Muerta de Total Energies encore  ; les innovations de Veolia dans les travaux de dépollution des boues extraites sur les chantiers de Vaca Muerta ; la prochaine inauguration du chantier d’extraction de lithium à 3800 mètres d’altitude dans la «Puna Salteña » d’Eramine… et bien d’autres encore.

Elle se félicite aussi de la présence et du travail de l’Agence Française de Développement, dont la vocation est de coopérer à des projets d’intérêt public avec des prêts à taux très faibles, comme par exemple celui octroyé pour la modernisation du réseau électrique de la ligne de chemin de fer Belgrano Sur.

Féminisme, lutte pour l’égalité femme/homme

Un des axes forts du mandat de l’Ambassadrice, première femme nommée à ce poste en Argentine, a été le féminisme. L’ambassade a particulièrement œuvré dans ce sens, jusqu’à prendre des positions nettes notamment lors des mouvements sociaux en faveur de l’accès à l’avortement, sanctionne au Congrès argentin par la loi de juin 2021. D’autres actions furent menées, telles que les travaux de recherche sur cette femme d’exception que fut Adrienne Bolland, afin de faire sortir de l’oubli cette aviatrice dont on a fêté le centenaire de la traversée en solitaire de la cordillère des Andes. Au niveau sportif les symboliques rencontres d’équipes de football féminines, ambassade-Villa 31, (la villa de emergencia, située à quelques centaines de mètres de l’ambassade). Le partenariat France-Argentine pour l’égalité femme-homme a pu voir le jour lors du Forum Génération Égalité, lance à Mexico et Paris en juin 2021, au cours duquel ont été définies une série d’actions pour accélérer les progrès dans ce domaine. Cependant, les combats sont loin d’être achevés. Claudia Scherer-Effosse souligne notamment le nombre malheureusement encore trop important de fémicides dans les deux pays : c’est pour elle un enjeu majeur, qui pourrait devenir un nouveau domaine de coopération. Elle applaudit l’exemple des initiatives prises, dans ce domaine, par l’association féministe argentine Casa del Encuentro.

Français, francophonie

Sont passés en revue au cours de la rencontre d’autres thèmes tels que la langue française ou la francophonie. L’ambassadrice pointe le manque de professeurs de français et le grand enjeu que représente le développement de cette formation pour faire face aux nécessites latentes dans nombre de villes et provinces argentines. Elle compte sur les conclusions et retombées auprès des autorités des travaux du congrès national des professeurs de français qui doit se tenir l’année prochaine dans la province d’Entre Ríos.

Deuxième pays d’Amérique du sud à adhérer à l’O.I.F. (Organisation Internationale de la Francophonie), en tant que membre observateur, l’Argentine a une riche histoire francophone et francophile. Cette année la fête de la francophonie a été célébrée avec plusieurs interventions brillantes. Des initiatives prometteuses se profilent : la première non négligeable est le rapprochement des ambassadeurs francophones en mission dans le pays. L’inauguration par ailleurs de l’espace francophone AUF (Agence Universitaire de la Francophonie) dans l’université USAL représente une belle et nouvelle avancée des thématiques liées à la francophonie.

Réseaux sociaux

En réponse à notre question sur la nature des réseaux sociaux, elle estime que l’usage des réseaux sociaux, « est fondamental ». « J’ai un compte Twitter personnel que je gère moi-même et l’Ambassade de France dispose de comptes officiels sur quasiment tous les réseaux. C’est assez étonnant de voir que les gens s’informent désormais de cette manière. Ça remplace même les communiqués de presse ! ». Elle dit avoir assister à l’évolution du service presse et communication de l’ambassade vers le tout numérique : une preuve concrète de la révolution que nous traversons.

Le futur

Comme il se doit, notre dernière question porte sur les futurs projets professionnels de Claudia Scherer-Effosse, qui après deux missions à l’étranger se doit de rentrer à Paris et d’y rester trois ans au minimum, « Ça malheureusement, je ne peux pas encore vous le dire, car je ne le sais pas moi-même. A mon retour en France, et selon ma catégorie de haut fonctionnaire je ne suis pas juste mutée quelque part, c’est à moi de trouver ma future affectation et, bien sûr il y a de la concurrence…Je postule dans les grandes directions, mais rien n’est encore défini. Nous verrons bien… ».

L’équipe du Trait-d’Union souhaite à Madame l’ambassadrice une bonne et agréable fin de séjour en Argentine, qu’elle devrait quitter quelques jours seulement avant les PASO, précédant les nouvelles futures élections présidentielles.

 

L’équipe du Trait-d’Union

 

 

 


 

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