Palmarès définitif de la rentrée littéraire
Retour sur une année de découvertes et d’émotions à travers les livres primés cet automne 2025.
Tout d’abord rappelons que le Prix Nobel de littérature a été remporté par le Hongrois Laszlo Krasznahorkai, pour l’ensemble de son œuvre ; son roman Guerre & guerre (2013), traduit par Joëlle Dufeuilly est publié par Cambourakis. C’est l’histoire de Korim, archiviste mélancolique, qui découvre un manuscrit relatant l’errance de quatre êtres angéliques fuyant la violence à travers l’Histoire. Bouleversé, il décide de transmettre ce message à l’humanité. Ce roman explore la vulnérabilité et la quête de refuge des personnages : un roman puissant empreint d’un inconsolable chagrin métaphysique.
Passons au prix américain Pulitzer avant d’aborder les romans français : il a été attribué à Percival Everett pour son roman James.
Qui est James ? Le jeune esclave illettré qui a fui la plantation ? Ou cet homme cultivé et plein d’humour qui se joue des Blancs ? Percival Everett transforme le personnage de Jim créé par Mark Twain, en un héros inoubliable. Ce grand roman d’aventures, pose un regard incisif sur la question du racisme, c’est l’histoire déchirante d’un homme qui tente de choisir son destin.
Le premier prix décerné lors de cette rentrée littéraire est le prix du roman FNAC remporté par John Boyne pour son ouvrage Les éléments (J.C. Lattès), également récipiendaire du prix Femina étranger.
L’auteur du Garçon au pyjama rayé livre une fresque fascinante en tissant quatre destins : une mère en fuite, un jeune prodige du foot, une chirurgienne marquée par ses blessures et un père en quête d’initiation. Une plongée intense dans les nuances de la culpabilité, portée par une écriture saisissante.
Le prix Goncourt récompense le roman de Laurent Mauvignier, La Maison vide (éditions de minuit), 750 pages…déjà un grand succès de librairie ! « En 1976, mon père a rouvert la maison héritée de sa mère, fermée depuis vingt ans”. On y retrouve des objets et des photos témoignant d’une histoire familiale marquée par deux guerres mondiales et plusieurs générations de femmes. “J’ai voulu reconstituer leur parcours pour mieux comprendre l’influence de leur passé sur le nôtre ».
Kolkhoze d’Emmanuel Carrère reçoit le prix Médicis. L’auteur retrace sur quatre générations l’histoire d’une famille franco-russe, de la révolution bolchévique à la guerre en Ukraine. Carrère mêle habilement archives familiales, grands événements historiques et drames personnels, pour tisser un récit où s’entrelacent destin familial, géopolitique et réflexions intimes sur la filiation et la mémoire.
Trois prix pour La nuit au cœur de Nathacha Appanah (Gallimard) : Femina, Goncourt des lycéens et Renaudot des lycéens.
C’est l’histoire de trois femmes confrontées à la violence conjugale. Nathacha Appanah explore l’impossibilité de tout dire avec force et sensibilité et s’attache à retranscrire la quête de justesse et de vérité face au féminicide : un texte entre ténèbres et espoir.
Prix Renaudot pour le roman Je voulais vivre d’Adelaïde de Clermont-Tonnerre publié chez Grasset qui revisite Milady de Winter, l’adversaire acharnée des “Trois mousquetaires” d’Alexandre Dumas : une Milady vue par une femme, avec les yeux du XXIème siècle. Aventures, psychologie et romances, tout cela servi par une écriture vive, au rythme haletant qui a su conserver l’esprit des romans de cape et d’épée. Au-delà de l’intrigue, le roman offre une réflexion pertinente sur la condition féminine au XVIIe siècle, faisant écho à des enjeux actuels comme la quête de liberté et d’émancipation. Un livre qui interroge, fascine et fait rêver.
Grand prix de l’Académie Française pour Passagères de la nuit, roman de Yanick Lahens (Sabine Wespieser – éditions). La lauréate du prix Femina 2014 pour Bain de lune retrace le parcours de Régina qui décide de « toujours avancer, sans se retourner » comme les femmes de sa lignée. Ce livre plonge au cœur des douleurs de l’histoire haïtienne et célèbre la résistance discrète des femmes : une résistance forçant l’admiration, révélant que l’histoire s’écrit aussi dans les gestes et les regards des vaincus.
Lauréate du prix des Inrockuptibles Laura Vazquez (éditions du Sous-sol) avec Les Forces : elle réinterprète le roman d’apprentissage à travers une narration mêlant théorie et quotidien, du tragique au comique. Le parcours initiatique de la narratrice est traversé par une nature vivante et omniprésente. Ce roman s’inscrit dans la lignée de Dostoïevski, Beckett et Simone Weil.
Le Crépuscule des hommes d’Alfred de Montesquiou (Robert Laffont) décroche le prix Renaudot-essai. L’auteur retrace le procès de Nuremberg en 1945 à travers les regards de témoins tels que Joseph Kessel, Elsa Triolet et Martha Gellhorn. Entre tensions internationales, témoignages des déportés et vie dans le château Faber-Castell, ce journaliste – grand reporter de guerre- met en récit les coulisses de cet événement majeur du XXe siècle.
Le prix Lire magazine a été décerné à Jean-Baptiste Del Amo pour La nuit ravagée (Gallimard). Dans la banlieue toulousaine des années 1990, des adolescents sont fascinés par une maison abandonnée cachée au fond d’une impasse. Après la mort tragique de l’un d’eux, ils décident d’y pénétrer, inconscients des dangers qu’ils encourent. Dans cet hommage au roman horrifique, l’auteur explore les rêves et les désillusions d’une génération face à la violence du monde et au passage du temps.
Enfin n’oublions pas le grand prix des lectrices – Elle, Mon vrai nom est Elisabeth, d’AdèleYon :« un premier livre poignant à la lisière de différents genres : l’enquête familiale, le récit de soi, le road-trip, l’essai. À travers la voix de la narratrice, les archives et les entretiens, se déploient différentes histoires, celles du poids de l’hérédité, des violences faites aux femmes, de la psychiatrie du XXe siècle, d’une famille nombreuse et bourgeoise renfermant son lot de secrets ».
Un choix varié et passionnant de livres à découvrir !
« Bonne lecture ! »
Elisabeth Devriendt
–
