La conquète du “low cost” aérien et ferroviaire en Europe

348cd8cLes compagnies aériennes “low cost” rencontrent aujourd’hui un vif succès auprès des consommateurs européens. Pourtant, leur fonctionnement reste encore souvent méconnu. Comment expliquer les tarifs ultra-concurrentiels de ces compagnies ? Le “low cost” sacrifie-t-il la qualité et la sécurité des passagers sur l’autel du bas prix ? Quid du “low cost” ferroviaire ?

Créées en Europe au courant des années 1990 avec la libéralisation du secteur aérien, les compagnies aériennes à bas coûts, dites “low cost” détenaient 40 % du marché aérien intra-européen en 2010, avec deux leaders (Ryanair et Easyjet), contre 25 % en 2005. La part de marché pourrait atteindre 50% d’ici 2020. En moyenne, les “low cost” proposent des vols près de 40% moins chers que les compagnies classiques, frais supplémentaires inclus (frais de bagages, frais de paiement par carte bancaire etc.). Le secret est simple : la baisse des prix résulte d’une productivité accrue des avions, qui volent, chaque jour, pendant beaucoup plus de temps que ceux d’une compagnie classique. Un avion immobilisé au sol coûte de l’argent, tandis qu’un avion en l’air en rapporte. Pour être rentables, les “low cost” sont obligées de maximiser le nombre de vols quotidiens de leurs avions, lesquels ne restent en moyenne que 25 minutes au sol contre près d´une heure chez les compagnies traditionnelles. C’est pour cela que les “low-cost” assurent des vols courts et moyens courriers. Ce système est difficilement applicable sur les vols long-courriers, compte tenu de la longue durée des vols et des temps d’escale incompressibles. De surcroit, les “low cost” ne garantissent pas de correspondance, et ne perdent donc pas de temps à attendre les vols en retard. Enfin, la gestion des coûts est très minutieuse : le personnel, réduit au maximum, s’occupe aussi bien de l’enregistrement des passagers que du nettoyage de la cabine, les billets sont presque exclusivement vendus sur Internet, et tout le superflu est mis en option payante, les clients étant libres de choisir ou non les options.

La contrepartie des “low cost” est-elle un déficit de sécurité ?

En Europe, Ryanair et Easyjet n’ont jamais eu d’accidents. Leurs avions sont très récents, car ils sont renouvelés fréquemment pour des questions de consommation de carburant et de coûts d’entretien. Les “low cost” n’ont pas à rougir en termes de standards de sécurité. Si l’on regarde la ponctualité des vols, les études empiriques montrent que les vols “low cost” sont en moyenne plus ponctuels que ceux des compagnies classiques.

“Aujourd’hui, le vrai souci du low cost, c’est le droit du consommateur”

dénonce Emmanuel Combe, économiste et auteur du Low cost, aux éditions La Découverte. En l’absence d’agences physiques, les consommateurs ont du mal à faire valoir leurs droits. En cas de retards ou d’annulations de vols, les “low cost” invoquent souvent la présence de circonstances extraordinaires pour éviter d’indemniser les passagers. Easyjet a justifié les onze heures de retard d’un vol Paris-Toulouse en janvier dernier par des conditions météorologiques défavorables. “Tout le monde était sur les nerfs. Les passagers étaient stressés et EasyJet se refuse à rembourser les billets” explique, en colère, Luc, à La Dépêche du Midi. Toutefois, on a vu des améliorations ces dernières années grâce à l’action de la Commission Européenne. Par exemple, les billets sont aujourd’hui toujours affichés TTC. (toutes taxe comprises). C’est à l’Etat de fixer des règles du jeu, défendre les consommateurs, et sanctionner quand il le faut.

la France a pris un certain retard dans le domaine du low cost

regrette Emmanuel Combe dans une interview avec le site d’information Atlantico. C’est aujourd’hui l’un des seuls grands pays européens à ne pas avoir de compagnie “low-cost” nationale. Contrairement aux Allemands, aux Espagnols et aux Anglais. Il ne s’agit pas d´être pour ou contre le “low cost”, mais d’accepter la réalité : le “low cost” s’est imposé en Europe. Aujourd’hui, Air France essaie de s’adapter en lançant l’initiative “bases province” à partir de la rentrée 2011, pour baisser ses coûts de l’ordre de 15%. C’est une bonne idée mais l’idéal aurait été de créer ou de racheter, comme Iberia l’a fait en Espagne avec Vueling en 2009, une deuxième compagnie nationale 100% “low cost”, dédiée au segment court/moyen courrier en Europe.

Face au succès du “low cost” aérien, on peut s’attendre à un essor du “low cost” ferroviaire dès 2012, date de l’ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de passagers en Europe. Le monopole exercé par la SNCF sera donc brisé en France. En 2004, la SNCF avait lancé l’initiative “IDTGV” pour concurrencer les compagnies aériennes “low cost” sur certaines destinations telles que Paris, Lyon, Marseille. La filiale IDTGV réalise des économies grâce à une distribution des billets exclusivement assurée par internet (www.idtgv.com) et en ajoutant des rames supplémentaires IDTGV à un train classique SNCF. A partir de 2012, Veolia envisagerait de signer un partenariat avec Trenitalia, la compagnie de transport ferroviaire nationale italienne, pour se lancer dans le “low cost” ferroviaire en France. Trois lignes seraient concernées, parmi lesquelles l’axe Bruxelles-Paris-Lyon, et la ligne Paris-Strasbourg. De son coté, la SNCF étudie la possibilité de lancer des TGV 100% “low cost” en 2012, afin d’anticiper l’arrivée de la concurrence, mais aussi améliorer la rotation des rames.

Charles Gaudry

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